XIXe / 1852 / Ajaccio – Palais Fesch – Musée des Beaux-Arts & Bibliothèque Fesch
Ajaccio - Palais Fesch (août 2023). Photo © François Fiette.
Coordonnées GPS : Altitude (données GPS) : ± 10 m.
41.922056, 8.738457 ou 41°55'19.4"N 8°44'18.5"E
Adresse : 50-52, Rue Cardinal Fesch, 20000 Ajaccio. Inscrit/Classé Monument Historique : Oui.
Le site
L’ensemble architectural est beau et magnifiquement entretenu. La rue du Cardinal Fesch est piétonne et très animée l’été. De nombreux commerces de tous types la bordent. Voir, si besoin, « Le stationnement à Ajaccio ».
Un peu d’histoire
Le Palais Fesch est honoré du label prestigieux « Musée de France », témoignant de l’excellence de son architecture et de la qualité remarquable des œuvres qu’il conserve.
Le cardinal Joseph Fesch nourrissait le souhait de permettre aux Corses d’accéder à l’éducation sur leur territoire. Dans cette optique, il investit ses ressources personnelles pour la construction d’un "institut catholique" intégrant une galerie d’art, une bibliothèque et des salles d’études. Cet institut deviendra plus tard le Palais Fesch.
En 1839, le cardinal Fesch, oncle de Napoléon Bonaparte, lègue à la ville d’Ajaccio une collection exceptionnelle composée de plus de mille objets d’art (extraits d’un ensemble de près de 18 000 pièces), ainsi que ses manuscrits, sa bibliothèque et une partie de son mobilier.
La construction du Palais, réalisée entre 1828 et 1852, a mobilisé plusieurs architectes. Les travaux furent initiés par l’architecte Frasseto, puis poursuivis par Jean Caseneuve, suivis des architectes-décorateurs Jérôme Maglioli et Jean Exiga. Malheureusement, le cardinal Fesch ne put assister à l’achèvement de l’édifice, puisqu’il s’éteint en 1839 à l’âge de 76 ans à Rome. Il repose désormais dans la chapelle impériale attenante au Palais Fesch, aux côtés d’autres membres de la famille Bonaparte. Il convient de souligner que cette chapelle fut également construite à l’initiative du cardinal, conformément à ses dernières volontés.
En 1856 la statue en bronze du cardinal, exécutée par le sculpteur Gabriel-Vital Dubray, est dressée au milieu de la cour d’honneur du Palais.
Divers legs et donations ont progressivement enrichi les collections du musée Fesch.
Au cours du XXe siècle, le musée a été délaissé, une partie de ses locaux ayant été convertie en lycée. Les œuvres y étaient entreposées dans des conditions précaires, et l’établissement a fermé ses portes en 1979, événement qui peut sembler surprenant au regard de son importance patrimoniale.
Dans les années 1980, le Palais a fait l’objet d’une réhabilitation complète. Le musée a rouvert en juillet 1990. Aujourd’hui, il comprend environ trente salles réparties sur quatre étages, où sont exposées pas moins de quatre cents œuvres. En 2010, il a pris le nom de Musée des Beaux-Arts et abrite notamment des pièces rares, parmi lesquelles un Botticelli.
Le musée Fesch occupe une place de premier plan à l’échelle nationale. Il s’agit du deuxième musée de France, après le Louvre, en matière de conservation et d’exposition de peintures italiennes, principalement acquises en Italie par le cardinal Fesch ainsi que par des généraux de l’Empire. Ses collections comptent plusieurs centaines de tableaux issus de différentes périodes et écoles européennes, comprenant notamment la collection dite « napoléonienne », composée de 700 œuvres liées au Premier et au Second Empire.
À l’avenir, un corridor de déambulation viendra relier le Palais et la chapelle impériale, permettant de proposer aux visiteurs un parcours enrichi, ainsi qu’un espace dédié à des ateliers pédagogiques.
XIXe / 1850 / La bibliothèque
La bibliothèque majestueuse, d’une longueur impressionnante de trente mètres et classée Monument Historique, constitue un complément prestigieux au palais Fesch. Située dans l’aile nord, elle est également enrichie par un auditorium.
Commandée par Napoléon Bonaparte et réalisée par son frère Lucien Bonaparte, la bibliothèque fut inaugurée en 1868. Elle contient aujourd’hui un fonds remarquable de 40 000 ouvrages rares et anciens, parmi lesquels figurent trente incunables, ces livres imprimés en Europe avant le 1ᵉʳ janvier 1501. Les boiseries, intégralement réalisées en noyer, confèrent à cet espace une élégance intemporelle. Lucien Bonaparte a ainsi permis la création d’une bibliothèque inspirée des grandes bibliothèques humanistes de la Renaissance, abritant les savoirs de l’époque dans des domaines variés tels que la médecine, l’astronomie, le droit, la littérature, l’histoire et les sciences. Grâce au travail méticuleux du bibliothécaire André Touranjon, un catalogue exhaustif du fonds a été élaboré, et il est actuellement accessible en ligne via la plateforme Gallica. Les ouvrages proviennent de collections prestigieuses, notamment parisiennes, de couvents corses, de monastères européens et même de l’ancienne Sorbonne.
En 2020, un ouvrage d’une valeur inestimable a été mis en lumière au sein de cette collection historique. Il s’agit d’un livre d’Isaac Newton datant de 1686, surnommé « La Bible des mathématiques modernes », découvert par Vannina Schirinsky-Schikhmatoff, chargée de mission à la bibliothèque Fesch à l’époque. Cet ouvrage, dont la valeur est estimée à 3,7 millions d’euros, témoigne de l’importance de ce fonds exceptionnel.
La bibliothèque conserve également deux cents manuscrits datant des XVIIᵉ et XVIIIᵉ siècles, ainsi que des œuvres rarissimes telles que le « Thesaorum Hyeroglyphicorum » de 1610, un traité d’égyptologie dont seulement sept exemplaires subsistent dans le monde, et un livre de cosmographie de 1553 accompagné de remarquables instruments de mesure en papier. Par ailleurs, le fonds comprend un ensemble significatif d’ouvrages corses et une collection précieuse de monographies artistiques.
L’année 2023 marque le début d’une nouvelle phase de restauration de la bibliothèque, visant à lutter contre l’humidité et à mettre les installations aux normes, pour un budget total de 1,8 million d’euros financé par l’État, la Collectivité de Corse (CdC), la municipalité, la Mission Bern de la Fondation du Patrimoine, ainsi que Dassault Histoire et Patrimoine, entre autres. Les boiseries en châtaignier massif, les éléments décoratifs et les peintures ont été soigneusement restaurés, tandis que les marbres ont été décontaminés. L’escalier monumental reliant le Palais Fesch à la bibliothèque a retrouvé son éclat d’origine. Les célèbres lions en plâtre moulé de Canova, situés à l’entrée, ont été réhabilités (les originaux étant conservés au Vatican). L’escalier à double volée, partiellement refait, mène désormais à la grande salle de trois cents mètres carrés, débarrassée de sa moquette rouge, et mise en valeur par ses escabeaux d’époque. La longue table de lecture en noyer a été restaurée à l’identique, et les rayonnages ont été sublimés. Un système moderne de régulation précise de la température et de l’humidité a également été installé pour assurer une conservation optimale des ouvrages d’une rareté exceptionnelle.
En parallèle, un projet ambitieux d’inventaire complet des 25 000 ouvrages anciens a été lancé. Cette opération, sans précédent depuis le XIXᵉ siècle, devrait s’étaler sur une durée d’environ vingt ans. L’Université de la Sorbonne s’est associée à cette entreprise, en mobilisant ses experts, spécialistes et doctorants pour mener à bien ce travail minutieux.
Bibliothèque Fesch. Photo Isiwal, licence libre Creative Commons.